lundi 29 novembre 2010

Spider-man noir : un polar tissé au poil !

Spider-man noir Les yeux sans visage
David Hine, Fabrice Sapolsky/Carmine di Giandomecino
Panini, 2010

Le label noir de Marvel été inauguré en Décembre 2009 pour la série Spider-man et voilà le second volume proposé par la même équipe 100% européenne. Quatre autres titres d'autres séries sont disponibles.

Le contexte : offrir des aventures du héros tisseur de toile dans l'ambiance de la prohibition des années 30.

Dans cet épisode plutôt bien troussé, on suit Peter Parker, dans un costume pas franchement classe démanteler un réseau d'expérimentation scientifique mené sur des personnes noires.
Octavius est le médecin handicapé qui s'amuse avec les cerveaux de pauvres bougres, ramassés dans les prisons, et il arrange bien ses fournisseurs qui ont d'autres vues sur l'anéantissement total de cette "sous race" d'après eux.
Des relents d'holocauste qui font froid dans le dos, mais c'est justement cette atmosphère glauque et poisseuse qui donne tout son charme à ce one shot.

Les personnages évoluent dans un univers parallèle, ancien, où les origines sont quelque peu redéfinies.
Oubliez le costume rouge et bleu, oubliez les batailles au milieu des gratte ciel, ici, il s'agit plutôt de visages tuméfiés, de gros calibre, de mafia et d'hôtels miteux.
Et Octopus n'est qu'un scientifique de seconde zone dont la maladie congénitale empêche l'embauche par Henrich Himmler lui-même...(très belle scène finale)

La relation tendue entre Parker et Felicia, alias la chatte noir (du nom de son bar le Back cat) en grande partie basée sur le sexe apporte aussi une touche beaucoup plus adulte à cette série parallèle.
(à droite : je ne savais pas que les balconnets et les strings existaient dans les années 30 ?...)

Le dessin de l'italien Giandomenico, très "européen", (avec parfois même un côté "art déco") est assez agréable et se met de toute façon entièrement au service d'un scénario bien ficelé.

Noir,... et adulte : un bon polar, qui aurait presque pu se passer de l'homme araignée.

samedi 13 novembre 2010

Bajram, shaman de l'IS*

Bajram, destructeur d'univers
Thierry Bellefroid (entretiens)
Soleil
Octobre 2010

Denis Bajram, né en 1970 a été mondialement reconnu (1) avec son chef d'oeuvre d'anticipation en 6 tomes "Universal War One", publié chez Soleil de 1998 à 2006. Au delà de sa qualité scénaristique, cette série a montré une technique de colorisation numérique en avance pour l'époque (2).
Avant cela, son auteur avait publié les deux tomes de Cryozone chez Delcourt, autre récit de science-fiction de qualité, scénarisé par Thierry Cailleteau (série Aquablue). On se reportera à sa bibliographie complète sur Bedetheque.

Dans ce livre d'entretiens fleuve (240 pages tout de même), Thierry Bellefroid a été à la rencontre d'un homme au caractère bien trempé et à la culture féconde. On y parle Bande dessinée bien sûr, mais aussi beaucoup politique, religions, et milieu de l'édition. C'est ce qui fait la richesse du livre, par ailleurs abondamment illustré...(...)

> La suite à lire sur le Blog d'Hectorvadair.

(* : Illustration séquentielle : une appellation utilisée par Bajram dans ces entretiens)

lundi 8 novembre 2010

La (nouvelle) Frontière de Foerster

La frontière
Foerster
Quadrants 2010

Je faisais allusion l'autre jour, à l'occasion de la chronique de "Old skull" de B-gnet au retour fracassant de la thématique Western dans la bande dessinée ces dix dernières années. (Pour ne pas parler de celle des pirates.)

Et de citer, parmi les plus marquantes : Bouncer, Billy wild, Calimity Jane, et diverses histoires noir et blanc parues dans des fanzines ou revues spécialisés
(cf chronique de Billy wild et Old skull)

Foerster, que les plus anciens ont connu à l'époque de sa gloire dans Fuide glacial a fait une grande partie de sa carrière avec des recueils d'histoires lugubres et cauchemardesques du meilleur cru.
(voir sa fiche sur bedetheque)

On l'avait un tant soit peu perdu de vue depuis, et c'est pourquoi le revoir au dessin et scénario dans un bouquin grand format couleur de 72 pages chez Quadrants (collection Soleil) me ravi personnellement. Car autant la couverture laisse un petit goût de "aurait pu mieux faire", autant l'intérieur mérite le détour.

...Géronima Uranza, petite brunette énervée d'à peine 18 ans, fille soit disant de Billy the kid, débarque dans ce one shot en flinguant en plein désert son canasson qui a l'air d'avoir attrapé une sérieuse maladie.
Elle arrête alors une diligence et rejoint avec ses passagers le relais Corralito. Là; à l'aide d' Ashley Upston, écrivain de son métier, elle va traverser la "frontière", sorte de tourbillon de sable magique qui les fera pénétrer au coeur d'une ville maudite dirigée de main de maître par Claus Christmas, un despote aux pouvoirs maléfiques.

Si au premier abord on peut être surpris par la densité des textes de ce récit pas tout à fait comme les autres, (mais aux dialogues très "parlés" à la façon de Billy Wild), on comprend très vite que mister Foerster a décidé de nous raconter une bien belle histoire, et qu'il va le faire, quoi qu'il en coûte.
Vu que l'entrée en matière est rapide, et le suspens bien tenu, on a finalement aucun mal à se laisser entraîner.

Le dessin depuis les années 80 a gagné en souplesse, le format plus grand rajoute à la clarté, et la couleur (due à Samsa) contribue au modernisme du style.
Les personnages sont parfois un peu Disneyien au niveau graphique (Bd jeunesse), alors qu'on aurait presque préféré du bon gros gothique sur toute l'histoire, comme au bon vieux temps. Ceci dit, final, les éléments propres au récit suffisent à assoir le côté fantastique et un peu dingue annoncé par le synopsis.

Il y a du "Bouncer" néanmoins dans "Frontière" : La petite maison au milieu du désert où se trament des choses pas claires, le vengeur aux colts rapides, les malédictions..., et on peut y croiser un Stryge (Azaziel), voir du John Rambo (le méchant cochon bouffeur de curé); mais les références sont tellement bien assimilées que l'émotion reste intacte. Sans compter un rythme soutenu et une violence de série B (voire Z) très réjouissante, ainsi que des détails savoureux. (Belle charge de longues cornes squelettes du plus bel effet !)

Citons par exemple l'anecdote de ce journaliste qui essaye de saisir en direct l'histoire se déroulant sous ses yeux, afin de gagner le jackpot éditorial. Sa présence dans les cases comme simple spectateur constituant à mon goût une belle mise en abîmes et un beau clin d'oeil au western, que Foerster a semble t-il bien apprécié :
"Si la légende dépasse la réalité, imprimez la légende". (John Ford à propos de Rio grande)

On pourra justement se référer au western classique du cinéma pour trouver des références bien antérieures à "Bouncer", par exemple la maison en plein désert où des sudistes se livrent à un trafique d'armes avec les apaches, dans un film dont je n'ai jamais retrouvé le nom, ou bien celle en bande dessinée de Jonathan Cartland dans "Les doigts du chaos"(1982)

En bref, et pour conclure : un album original, plutôt beau, et à l'histoire passionnante. Bravo.

Lire les 7 première spages sur DigiBD

Analyses